6 oct. 2014

Mes expériences culinaires

Etre mère – adoptive ou non - signifie être capable de faire preuve tout à la fois d'intelligence, d'à propos, de débrouillardise, d'innovation, d'imagination, d'abnégation, d'anticipation, de créativité, et j'en passe.

J'ai toujours aimé cuisiner, mais jusqu'à présent, j'étais mon seul cobaye, et mes expériences ne nuisaient à personne qu'à moi-même.

Pour la petite histoire, il faut que je vous dise qu'avant de décider d'avoir un enfant, Julien et moi vivions chacun chez soi. Ce qui nous autorisait une vie tranquille, sans contrainte ni obligation, chacun vivant comme il l'entend : nourriture, choix du programme de télévision, heure de coucher et de lever, choix de la radio, sortie copines sans rendre de comptes etc etc etc.


Ce qui fait que notre façon diamétralement opposée de nous nourrir n'a jamais gêné personne : en effet, Julien mange de la viande et de la charcuterie à tous les repas - voire plus - agrémentées de pommes de terre. 

Frites ou sautées, de préférence.

Il cuisine divinement bien, du petit salé aux lentilles à la blanquette de veau en passant par le cassoulet ou les tomates farcies.
Je ne crache pas sur ces petits plats, mais j'essaie de manger peu de viande et plus de légumes.
Alors bien sûr, occasionnellement, un pot au feu ou une entrecôte béarnaise, c'est bon, mais pas tous les jours.


Ma cuisine à moi, elle est beaucoup moins fun, je l'avoue. Le dimanche midi où j'ai proposé à Julien et à Flore une soupe de fanes de radis, une salade de betteraves aux pousses d'alfalfa et du riz basquaise, c'était bon, certes, pleins de vitamines et de fibres, c'est sûr, mais beaucoup moins dominical que le traditionnel poulet-frites de Julien. 

 
J'ai bien enregistré la déception de Flore (je ne parle même pas de celle de Julien), et je me suis dit que franchement, moi qui avais des velléités vegan, il allait falloir faire preuve d'inventivité pour y rallier la famille.

C'est pourquoi j'ai décidé de me lancer dans des innovations culinaires originales.
Histoire de donner du peps à mes fanes, mes navets et autres salsifis.

Pour commencer, j'achète un livre de cuisine végétarienne, dans lequel je trouve tout simplement des idées pour cuisiner les légumes, en tians, pains, quiches, tartes, brick... et ça plaît à Flore.
Un essai transformé pour l'équipe veg !

Cela dit, pour être tout à fait honnête, j'ai quelques fois des ratés, quand j'essaie d'employer à ma façon – c'est à dire sans suivre la recette – les ingrédients inhabituels. 


Par exemple, l'agar-agar. C'est un liant et gélifiant végétal qui permet de remplacer la gélatine animale.
Normalement, 
l’agar-agar doit être porté à ébullition dans un liquide, et se gélifie en refroidissant. Mais comme d'habitude, je ne prends pas le temps de lire la notice du sachet d'Agar-agar, j'en mets pour lier une sauce, comme j'aurais fait avec de la fécule de maïs.
Sauf que ce n'est pas de la fécule de maïs. Et malgré l'énergie que je mets à fouetter l'ensemble, l'agar-agar s'agglutine, coagule, et donne à la sauce un air de vomi de chameau.


Flore, qui est une gourmande, mais aussi – on ne peut pas être pénible dans tous les domaines – mange facilement de tout, se penche avec prudence sur le plat : Tagliatelles sauce agglomérat.


Tête brûlée de nature, elle se lance courageusement et goûte ; écrase étonnée un amas de sauce entre ses dents, qui restent collées ensemble quelques secondes ; tente de déglutir avec difficulté, et, une petite larme au coin des yeux, me supplie :
- Maman, je crois que c'est pas très bon.
Je lui concède.
Et sors une tranche de jambon.
Essai marqué par l'équipe carnivore.

Mais malgré ces échecs que je considère formateurs, je n'ai pas dit mon dernier mot, et, face aux millions d'animaux élevés en batterie et tués dans des abattoirs, lieux de tortures et de souffrance, je me radicalise, et achète un livre de recettes vegan.

Le vegan, c'est encore plus restrictif que végétarien. Pour moi, végétarien signifie ne plus manger de viande.

Mais vegan, ce n'est non seulement plus de viande, mais plus d'oeufs, plus de poisson, plus de laitages, plus de beurre, et plus de... fromages.
Là, j'avoue. Ca m'en fiche un coup. Mais je tiens bon, et, avant de tester sur Flore et Julien qui en ont assez de jouer les cobayes (Julien a été très affecté par la dégustation de chorizo végétal), je fais des essais.

Première recette, un gâteau. A base de noix, carottes, amandes, farine non raffinée, sucre muscovado (un truc un peu lourd et collant), huile, bicarbonate de soude...
La recette me semble... comment dire... assez consistante :
Pas d'oeufs, pas de beurre ou de crème fraîche pour alléger un peu. Et je n'ose plus employer d'agar-agar. 


Mais il faut être prêt à changer ses habitudes, c'est comme ça qu'on apprend.


Je fais donc le gâteau, je touille avec une pelle en bois et beaucoup d'énergie, aussi - parce que, fichtre, qu'est ce que la pâte est dense -, et je le cuis presque deux heures dans un moule à cake rectangulaire.


C'est assez long à cuire (faut dire qu'il y a de la matière), ça sent plutôt bon, et je finis par sortir un chouette gâteau qui a une fière allure gonflée (le bicarbonate, sûrement). Mais tandis que je m'apprête à le démouler, le voilà qui s'écroule en son centre, creusant un profond sillon dans toute sa longueur.
Ca me rappelle vaguement quelque chose, mais je ne sais pas (encore) quoi.
Flore arrive, attirée par l'odeur, et regarde la chose :
- Et... tu crois qu'on peut manger du gâteau-raie-des-fesses, maman ?

J'ai remisé mon livre de recettes vegan derrière le « viandes et volailles » de Julien. 


Je ne suis pas encore prête, psychologiquement, à cuisiner des boulettes de vomi de chameau ou des gâteaux-raie-des-fesses.

Mais c'est parce que je manque d'entraînement.
Promis, dès que j'ai essuyé de mon front la honte de mes échecs cuisants, je m'y remets !


En secret.



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